Strasbourg | Place Kléber Une minorité sri lankaise demande la reconnaissance de son génocide

Des manifestants se sont réunis ce vendredi, place Kléber, pour rendre hommage aux victimes tamoules du Juillet Noir. Cet événement s’est déroulé en 1983 et marque le début de la guerre civile au Sri Lanka.
Alizée CHEBBOUB-COURTIN - 24 juil. 2020 à 18:06 | mis à jour le 24 juil. 2020 à 18:14 - Temps de lecture :
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146 679 personnes seraient encore portées disparues.  Photo DNA /Maksym Toussaint
146 679 personnes seraient encore portées disparues. Photo DNA /Maksym Toussaint

« Nous avons besoin que le pays des Droits de l’Homme et des philosophes des Lumières reconnaisse les crimes de guerre, crime contre l’humanité et le génocide commis contre les Tamouls », indique la pancarte posée au pied de la statue du Général Kléber. Ce vendredi, une trentaine de membres de l’Union des Tamouls d’Europe et de l’association Tamoul Cholai s’est rassemblée pour se souvenir des victimes de ce qu’ils appellent le génocide des Tamouls. Les manifestants accusent la majorité sri lankaise bouddhiste, les Cinghalais, ainsi que le gouvernement en place d’avoir perpétré des crimes de guerre et crimes contre l’humanité à l’encontre des Tamouls hindous, minorité principale de l’île.

« On ne devrait plus laisser des populations mourir pour des raisons ethniques »

Le conflit éclate le 24 juillet 1983, lors d’une attaque des Tigres de libération de l’Eelam tamoul (LTTE) contre une unité militaire. Ces indépendantistes dénoncent notamment les disparités d’accès à l’éducation et à l’emploi, ainsi que la dénégation de leur origine et de leur culture. Cet événement donne ensuite lieu à des violences à l’encontre de la communauté tamoule, qui détient alors beaucoup de commerces. « Vols, viols et meurtres ont été perpétrés dans la capitale, puis se sont étendus dans tout le pays », explique N. Kirupananthan, président des deux associations présentes, arrivé en France en 1990. À ses côtés, un jeune homme brandit une pancarte. « Mon père était au travail quand des militaires lui ont tiré dessus. Il a réussi à se cacher, mais une de mes tantes est morte là-bas », raconte Presenna, qui vient d’achever ses études de médecine.

Qualifié de véritable pogrom, et rebaptisé le Juillet Noir, cet événement a évolué en guerre civile. Celle-ci s’est achevée en 2009, mais de nombreux témoignages de violences ont été reportés depuis, mettant en cause l’armée et le gouvernement. En 2011, le secrétaire général de l‘Organisation des Nations unies (ONU) fait état de crime de guerre et de crime contre l’humanité dans un rapport. Cependant, ni le président sri lankais actuel, Gotabaya Rajapaksa, ni la communauté internationale ne semblent avoir réagi depuis.

Une situation toujours compliquée

La situation est encore très tendue dans l’île. « Ma maison et la terre de mes ancêtres sont occupées. Je ne peux plus m’y rendre », explique N. Kirupananthan. Par ailleurs, les inégalités économiques et sociales demeurent. « Ceux qui sont là-bas ont peur de parler, car ils sont minoritaires. La reconnaissance internationale est un soutien indispensable pour que la situation se débloque et que le gouvernement prenne ses responsabilités », clame Jeevana, venue avec trois amies. Les manifestants demandent aujourd’hui la reconnaissance de ces crimes et le soutien de la France, afin qu’une enquête internationale soit lancée.